Corpus Le Docteur mysterieux

Tome 2 - Chapitre 35

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XXXV Jemmapes[Par GaelleGuilissen] Ce chapitre a été publié dans Le Siècle du 15 février 1870.

De même qu’en jetant les yeux sur la carte rien n’était plus facile que de se rendre compte[Par GaelleGuilissen] [rien n'était plus facile que de se rendre compte] "rien n'était plus facile de se rendre compte" de la bataille de Valmy[Par AudeHerbert] "Bataille de Valmy" : Le 20 septembre 1792, à Valmy, la Révolution française est sauvée in extremis de l'invasion étrangère, de même, en prenant la même peine, rien ne sera plus facile que de se rendre compte[Par GaelleGuilissen] [rien ne sera plus facile que de se rendre compte] "rien ne sera plus facile de se rendre compte" de la bataille de Jemmapes[Par AudeHerbert] "Bataille de Jemmapes" : Six semaines après un premier succès à Valmy, la toute jeune République française décide de pousser son avantage contre les Prussiens et les Autrichiens qui la menacent d'invasion. Le 6 novembre 1792, les volontaires de l'armée française battent les soldats autrichiens à Jemmapes, près de Mons, en Belgique. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8755567.

Nous avons dit que l’armée autrichienne était rangée sur les collines qui s’étendent en amphithéâtre depuis Jemmapes jusqu’à Cuesmes[Par AudeHerbert] "(..) s'étendent en amphithéâtre depuis Jemmapes jusqu'à Cuesmes." : La position de l'ennemi : "A une demi-lieue en avant de Mons, s’étend une colline boisée, dont la droite s’appuie sur le village de Jemmapes et dont la gauche s’étend en avant de Cuesmes, village qui touche aux faubourgs de cette place forte. De ce côté, Mons est couvert par les hauteurs de Berthaimont, de Pallizel et de Nimy, qu’enveloppe le cours sinueux de l’Haisne, rivière qui, après avoir baigné les fortifications et rempli les fossés, s’écoule au milieu de plaines marécageuses derrière le coteau de Jemmapes. C’est sur ce coteau que le duc Albert avait établi ses troupes et attendait l’armée française. Il comptait sous ses ordres 25000 soldats réunis et dont 20000 au moins garnissaient la hauteur. La ligne autrichienne formait deux crochets. L’un en arrière à droite avait son flanc couvert par Jemmapes, l’autre en avant à gauche était en l’air et sans appui. L’art avait d’ailleurs ajouté aux difficultés naturelles de la position, déjà défendue de front par un escarpement couvert de taillis épais, en établissant diverses lignes de retranchements et de redoutes dont les batteries présentaient un triple étage de feux croisés. Les avant-postes ennemis occupaient, dans la plaine, en face des retranchements, les villages de Quareignon, de Pâturage, de Wames, de Frameries et le mamelon où s’élève le moulin de Boussu, dominant le bourg de ce nom, qui avait été aussi retranché." Pour plus d'information sur les postions des troupes et le déroulement de la bataille lire :http://aufildesmotsetdelhistoire.unblog.fr/2012/11/06/le-6-novembre-1792-%E2%80%93-la-bataille-de-jemmapes/.

Dumouriez adopta le même ordre de bataille[Par AudeHerbert] "Dumouriez adopta le même ordre de bataille" :http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84931974 .[Par GaelleGuilissen] [Dumouriez adopta le même ordre de bataille.] On trouve ici un retour à la ligne dans le journal. Le général Darville, qui occupait l’extrême-droite de la ligne, vers Frameries, fut chargé de partir avant le jour et d’aller occuper derrière la ville de Mons les hauteurs formant la seule retraite des Autrichiens.

Beurnonville[Par AudeHerbert] "Beurnonville" : Pierre Riel, marquis de Beurnonville (1752-1821), est un général français de la Révolution et de l’Empire, et un maréchal de France de la Restauration. Élevé au grade de lieutenant général le 22 août 1792, puis général en chef, il commande l'avant-garde de Dumouriez et combat à Valmy et à Jemmapes (6 novembre). Le 4 février 1793, il est nommé par la Convention ministre de la guerre.Dumouriez lui écrit, pensant qu'il peut soutenir ses projets. Mais Beurnonville remet la lettre au Comité de défense générale qui décide l'arrestation de Dumouriez., qui venait après Darville dans notre ordre de bataille, devait marcher droit sur Cuesmes et l’aborder de face. Le duc de Chartres[Par AudeHerbert] "Le duc de Chartres à qui .." : Dumouriez lance plusieurs charges d'infanterie auxquelles participe le duc de Chartres., à qui, dans son plan de royauté, Dumouriez destinait les honneurs de la journée, reçut le commandement du centre, et en même temps le grade de général[Par AudeHerbert] Michelet : "L'effort du combat devait être à la gauche pour emporter le village de Jemmapes et monter sur la hauteur, et plus encore à la droite, où la pente était couverte de formidables redoutes. Le vieux général Ferrand commandait à gauche ; à droite, le brave Beurnonville. Ce dernier poste était le poste d'honneur, et l'on y avait mis nos volontaires parisiens ; rude épreuve pour ces jeunes gens, arrivés d'hier et n'ayant jamais vu le feu. Dumouriez avait près de lui, au centre, le duc de Chartres, pour le lancer au moment où le succès d'une des ailes commencerait la victoire ; le candidat à la royauté, s'associant au mouvement de l'aile victorieuse, eût alors attaqué de face, décidé l'affaire, emporté l'honneur." . Sa mission était d’attaquer Jemmapes de front en essayant de pousser une partie de ses hommes dans la trouée que forme la grande route de Mons entre Jemmapes et Cuesmes. Enfin le général Féraud[Par AudeHerbert] Il n'y a pas de général Féraud dans le récit de Michelet. S'il existe bien un Jean Bertrand Féraud (1759-1795) affilié à la Convention Nationale, et qui fut un homme politique et révolutionnaire français.Celui-ci n'a jamais eu le grade de général. En effet, Michelet, dans son Histoire de la Révolution, indique que c'est Henri Becays Ferrand qui tenait cette position :"le vieux général Ferrand commandait à gauche (...). En effet, celui-ci est nommé maréchal de camp par Dumouriez, le 20 août 1792, et commande l'aile gauche de l'armée du Nord à la bataille de Jemmapes le 6 novembre 1792 (source : wikipédia)., qui commandait la gauche, devait traverser le village de Quaregnon et se porter sur les flancs de Jemmapes pour soutenir l’attaque du prince.

Partout la cavalerie se tenait prête à soutenir l’infanterie, et notre artillerie à battre chaque redoute en flanc et à éteindre ses feux.

Une réserve considérable d’infanterie et de cavalerie se tenait prête à marcher derrière le petit ruisseau de Vasme.

Ce fut le canon qui, des deux côtés, commença l’attaque ; puis, comme l’ordre en avait été donné, Féraud et Beurnonville se détachèrent, l’un allant attaquer la droite de Jemmapes, l’autre attaquant Cuesmes de front.

Mais ni l’une ni l’autre des deux attaques ne réussit.

Il était onze heures[Par AudeHerbert] "Il était onze heures" : Dumouriez attendit jusqu’à onze heures, des nouvelles de Beurnonville et de Ferrand. Il envoya alors son ancien aide de camp, le général Thouvenot, vers la gauche, avec ordre de diriger l’attaque et de ne le rejoindre que lorsqu’il serait maître de la partie de Jemmapes à laquelle cette gauche faisait face. ; on se battait depuis trois heures au milieu du brouillard[Par AudeHerbert] "au milieu du brouillard" : reprise du motif du brouillard, déjà utilisé précédemment dans le récit de la bataille de Valmy. Michelet décrit lui aussi le brouillard se levant et dévoilant l'armée française et sa grandeur : "(...)où le brouillard de novembre, commençant à se lever, découvrit l'armée française, un grand concert d'instruments se fit entendre, une musique grave, imposante, remplit la vallée, monta aux collines, une harmonie majestueuse semblait marcher devant la France." (Histoire de la Révolution, Livre VIII, Chap V- Jemmapes- 6 novembre)., et le brouillard en se levant montra le peu de progrès que nous avions faits. Il fallait, pour emporter la position de Jemmapes, un de ces hommes à qui on dit :

« Allez là, et faites-vous tuer ! »

Dumouriez avait cet homme sous la main : c’était Thévenot[Par AudeHerbert] "C'est Thévenot":fait référence en réalité à Jacques Thouvenot (1753-1810), général de brigade pendant la Révolution française. Aide de camp du général Dumouriez, il fait la campagne de 1792, avec beaucoup de distinction, particulièrement aux batailles de Valmy le 20 septembre 1792, et à Jemappes le 6 novembre 1792. En 1793, il est affecté à l’armée du Nord, et le 5 avril 1793, il suit le général Dumouriez dans sa fuite en Autriche, avant de passer au service de ce pays..

Thévenot traverse Quaregnon, fait cesser la canonnade, entraîne tout le corps d’armée de Féraud avec lui, tête baissée, musique en tête, baïonnette au bout du fusil, et aborde les Autrichiens[Par GaelleGuilissen] [et aborde les Autrichiens] La conjonction "et" n'est pas dans le texte du feuilleton..

De la vallée, où l’on ne pouvait[Par GaelleGuilissen] [où l'on ne pouvait] "où l'on ne pouvait pas", à cause du brouillard qui se levait lentement, voir les progrès de nos soldats, on les devinait à la musique dont l’harmonie majestueuse semblait marcher devant la France. De temps en temps, des volées de canon couvraient tout autre bruit ; mais, dans les intervalles de la détonation, on entendait toujours ces notes terribles de la Marseillaise, devant lesquelles devaient s’ouvrir les portes de toutes les capitales de l’Europe.

Au bruit de cette musique qui s’éloignait toujours, Dumouriez comprit que le moment était venu de lancer le jeune duc de Chartres. Le prince se met à la tête d’une colonne et trouve une brigade qui, voyant déboucher par la route de Mons la cavalerie autrichienne, manifestait une certaine hésitation.

Mais, dans ce moment même, le domestique de Dumouriez, voyant le général qui reculait avec ses hommes, court à lui au milieu du feu, le menace de prendre sa place avec sa livrée, lui fait honte et le pousse en avant ; c’est alors qu’arrive le duc de Chartres : ralliant à lui tous les fuyards, en formant[Par GaelleGuilissen] [en formant] "formant" (c'est un participe présent, non un gérondif) un bataillon auquel il donna le nom de bataillon de Jemmapes, il descend de son cheval qui ne peut gravir la pente trop escarpée, et à la tête de ces héros improvisés pénètre au milieu des feux d’une artillerie qui change la montagne en fournaise, jusqu’au village de Jemmapes, d’où il chasse les Autrichiens, et à l’extrémité duquel il fait sa jonction avec Thévenot.

Dumouriez, inquiet de ce qui se passait à sa gauche, prend lui-même une centaine de cavaliers et s’élance sur la route de Jemmapes ; mais, à peine est-il au tiers de la montagne, qu’il rencontre le duc de Montpensier envoyé par son frère pour lui annoncer que Jemmapes est au pouvoir des Français.

Du point où il est arrivé, il a vu l’hésitation des troupes qui attaquent Cuesmes ; un triple rang de redoutes arrêtait Beurnonville, et cependant, au moment où Dumouriez arrivait, Dampierre s’était élancé seul en avant, et le régiment de flanc l’avait suivi, puis nos volontaires s’étaient précipités, et l’on venait d’enlever le premier étage de la triple redoute.

Mais là il recevait le feu des deux autres. Un instant les volontaires parisiens crurent qu’on les avait réunis et entassés sous le feu de l’ennemi pour les anéantir. Dumouriez arrive, les trouve émus et sombres, et prononçant déjà tout bas le mot de trahison. Ce qui soutenait les deux bataillons jacobins cependant, c’était de voir le bataillon de la rue des Lombards, qui était girondin, recevoir la même pluie de feu. Puis ils étaient sous les yeux des vieux soldats de Dumouriez, qui regardaient comment ces conscrits se conduiraient sur le champ de bataille.

Ce fut en ce moment que Dumouriez, rassuré sur sa gauche, jugea important de faire un suprême effort sur sa droite et se jeta au milieu d’eux.

Comme si elle eût attendu ce moment, la lourde masse des dragons impériaux s’ébranla pour charger l’infanterie parisienne ; mais Dumouriez se plaça à la tête de cette infanterie, l’épée à la main.

– Feu à vingt pas seulement ! cria Dumouriez.[Par GaelleGuilissen] [Feu à vingt pas seulement ! cria Dumouriez.] Dans le journal, le point est remplacé par un point-virgule, et la phrase suivante est placée sur la même ligne.

Celui qui aura fait feu avant aura eu peur.

Tous entendirent cet ordre, tous l’exécutèrent ; ils laissèrent approcher jusqu’à vingt pas cette cavalerie sous laquelle la terre tremblait, puis à vingt pas les trois bataillons firent feu.

Deux cents chevaux abattus, trois cents hommes tués, leur firent un rempart ; puis, ne donnant pas le temps à cette lourde cavalerie de se rallier, il lança sur elle sa cavalerie légère, qui poursuivit les dragons jusqu’à Mons.

Lui alors se mit à la tête des bataillons et entonna la Marseillaise.

Ce fut un entraînement général ; tous ces hommes s’avancèrent à la baïonnette en chantant l’hymne de la liberté. Tous sentaient que le monde avait les yeux fixés sur eux à cette heure, et chacun d’eux fut un héros.

En quelques minutes, les deux autres redoutes furent emportées, les canonniers égorgés sur leurs pièces, et les grenadiers hongrois poignardés à leurs rangs.

Dumouriez ne fit halte que sur les hauteurs de Cuesmes, de même que Thévenot et le duc de Chartres n’avaient fait halte que sur les hauteurs de Jemmapes.

Par malheur, Darville avait mal compris l’ordre qui lui enjoignait de garder les collines par lesquelles les Autrichiens devaient faire leur retraite ; il s’arrêta à Berthatmont et s’amusa à canonner sans aucun effet les redoutes.

Sans avoir été chargé d’aucune mission particulière, Jacques Mérey avait été vu partout[Par AudeHerbert] "Jacques Mérey avait été vu partout" : après avoir été au centre de l'intrigue romanesque de la première partie du roman, Mérey se retrouve au centre de ce récit historique (il a aidé toutes les positions : à gauche, au centre, et à droite). : avec Thévenot lorsqu’il avait attaqué la gauche de Jemmapes ; avec le duc de Chartres lorsqu’il avait enfoncé le centre de l’ennemi ; avec Dumouriez lorsqu’il avait escaladé les redoutes.

Le lendemain, il se trouvait nommé sur les rapports des trois chefs.

Le compte des morts fait, il se trouva que de chaque côté la perte était à peu près égale : quatre ou cinq mille morts.

Mais la bataille de Jemmapes avait un résultat plus sérieux qu’un calcul arithmétique. La bataille de Jemmapes, c’était la cause des habitants du monde gagnée en première instance à Valmy, en appel à Jemmapes.

La bataille de Jemmapes n’était point, comme la bataille de Valmy, la victoire d’une armée.

C’était la victoire d’un peuple[Par AudeHerbert] "victoire d'un peuple" : l'armée de Jemmapes est, en effet, composée d'un grand nombre de volontaires non instruits militairement et qui font partie du "peuple". Michelet : "L'armée de Jemmapes était(...) discordante surtout, présentant je ne sais combien de bandes volontaires(..). Il existait des corps sous toute espèce de noms (chasseurs nationaux, chasseurs braconniers, etc..). Chaque corps se formait selon les villes ou villages, les quartiers, les amitiés, se baptisait à sa guise. Ce n'était pas une armée, c'était le peuple, à vrai dire, c'était la France arrivant au champ de bataille, toute jeune et tout naïve, dans la confusion du premier élan.".

De Jemmapes date l’ère de l’infanterie française[Par AudeHerbert] Michelet : "Grande révolution. L'infanterie française prit, ce jour-là possession des champs de bataille, et l'allemande s'éclipsa." .

Sous Charles-Quint, l’infanterie espagnole fut la première infanterie du monde.

Sous le grand Frédéric, ce fut l’infanterie prussienne.

Depuis Jemmapes, c’est l’infanterie française.

À partir de Jemmapes, deux chants patriotiques remplacèrent pour nos soldats le vin et l’eau-de-vie que l’on verse chez les autres peuples.

Avec la Marseillaise on gagna les batailles de plaine.

Avec le Ça ira ! on enleva les redoutes[Par AudeHerbert] Dumas résume très brièvement les derniers actes de la bataille qui voit l'armée de Dumouriez victorieuse, en reprenant les mots de Michelet qui écrit : "Et, au moment suprême, quand la droite hésita,e t qu'il s'agit de l'enlever, la Patrie leur versa l'ivresse à pleins bords...l'ivresse de leurs chants. La Marseillaise, entonnée par eux-mêmes, leur gagna la batailles, le ça ira ! emporta les redoutes.".

Au lieu de déjeuner, nos soldats, nus, à jeun après une nuit de novembre passée dans les marais, avaient chanté et vaincu.

À deux heures, la bataille était gagnée sur tous les points ; ils cessèrent de chanter, s’aperçurent qu’ils étaient fatigués et qu’ils avaient faim.

Ils s’assirent et demandèrent du pain.

Ils eurent du pain et de la bière, ce qu’il fallait pour ne pas mourir de faim.

Mais, à l’horizon, les belles plaines de la Belgique, et derrière elle le monde.

J’ai visité[Par AudeHerbert] "J'ai visité le champ de bataille" : De qui s'agit-il; à qui se réfère ce "je" ? Est-ce Dumas lui-même ? Michelet écrit : "Le champ de cette victoire, nous l'avons visité, pleins de respect et de religion, au mois d'août 1849." le champ de bataille de Jemmapes, comme j’avais parcouru le champ de bataille de Valmy.

À Valmy, pas d’autre monument que le cœur de Kellermann, qui a voulu avoir sa victoire pour tombeau.

À Jemmapes, rien[Par AudeHerbert] "A Jemmapes, rien" : Michelet : "Pleins de tristesse aussi, voyant ce champ nu. et désert. Nul monument de la bataille, nulle tombe élevée aux morts, pas une pierre, pas le moindre signe. La France, qui, près de là restaurait le tombeau du vieux tyran des Pays-Bas, de Charles-le-Téméraire, n'a pas eu une pierre pour les morts de la liberté. Les Belges, affranchis par Jemmapes, qui leur rouvrit l'Escaut, la mer et l'avenir, et qui, pour nous, commença la guerre de l'Angleterre, les Belges n'ont pas eu une pierre pour les morts de Jemmapes.".

Que la France ait été ingrate envers ses enfants, c’est tout simple ; les enfants ont deux mères : celle qui les a enfantés comme hommes, celle qui les a enfantés comme peuples.

À la mère qui les a enfantés comme hommes, ils doivent leur amour.

À la mère qui les a enfantés comme peuples, ils doivent plus que leur amour, ils doivent leur sang.

Mais la Belgique, à qui nous ne devions rien et à qui nous donnions la liberté, ne devait-elle pas, elle, une pierre à nos soldats ?[Par AudeHerbert] Michelet s'étonne et s'interroge sur cette absence : "Est-ce à dire que l'événement eut trop peu d'importance ?"

Cette pierre, elle en a fait sculpter un lion, et elle a mis ce lion sur le champ de bataille de Waterloo[Par AudeHerbert] "Waterloo" : Michelet opère une analogie entre la bataille de Jemmapes et celle de Waterloo : "La position n'était pas sans analogie avec celle de Waterloo, Comme l'Anglais à Waterloo, l'Autrichien avait à Jemmapes une grande ville derrière lui, d'où il tirait ce qu'il voulait. Mais combien le rude escarpement de Jemmapes, franchi par l'armée de la République, offrait plus de difficultés naturelles, artificielles, que le petit raidillon où vint se briser l'Empire ! Une ressemblance encore qu'ont les deux batailles, c'est qu'à l'une, comme à l'autre, l'armée française fut tenue, toute une nuit, au fond d'une plaine humide, et que le matin, affaiblie et détrempée, on la mena au combat.". Ce lion menace la France !

Orgueil de pygmée, ingratitude de géant !


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