Corpus Causes secretes de la Revolution

Division 13 : horrible découverte

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L’orage grondait sur la montagne ; la plaine retentissait de sifflements ; la mer soulevait ses flots agités. Je m’attachai fortement à connaître le point d’où partait la tempête.

Je découvris qu’il s’agissait d’entamer de nouveau la représentation nationale. Le 22 ou 23 messidorDébut du mois de juillet., au milieu de la place, adjacente à la salle des jacobins, était rassemblé un groupe entourant un homme effaré : on s’écrie, c’est un assassin de Robespierre, de Billaud-VarennesÀ partir de messidor, Billaud-Varennes s'oppose à Robespierre, ce qui crée une grande tension entre les partisans de Robespierre et Billaud-Varennes. Les partisans de Robespierre lui reprocheront d'avoir largement œuvré à son exécution. Mais il sera aussi perçu par d'autres comme un complice de Robespierre. Barère, notamment, aura une position ambiguë à son égard. ; il y a des scélérats dans la convention. A peine dans la société, Billaud se retourne et me dit : On est venu chez moi m’assassiner. – Il n’est pas étonnant qu’on en veuille à tes jours, répliquai-je, s’il y a des scélérats dans la Convention. – Nomme-les ? – Je ne les connais pas. Cette manière de répondre me priva d’obtenir des éclaircissements. NaulinMarc Claude Naulin, né en 1743 dont la date de décès est inconnue, était substitut de l’accusateur public au Tribunal révolutionnaire, puis vice-président de ce tribunal. Il fut arrêté et comparut devant le Tribunal révolutionnaire avec Fouquier-Tinville et ses collègues le 7 mai 1795, mais fut acquitté. disait aux jacobins : il faut chasser de la Convention tous les hommes corrompus.

Le soir où Barère présidait la société, le voile fut entièrement déchiré : il me prie de lui faire venir ses rapports sur les victoires : je vais les chercher et les lui remets moi-même. Il jouissait d’avance du plaisir d’émouvoir la société et les tribunes. Vaine erreur ! Robespierre occupe toute la séance par un discours artificieux, fait pour tromper des hommes, même éclairés. Barère souffrait ; sa réputation politique fut attaquée, compromise. Après la séance, j’accompagnai Barère dans son laboratoire, voisin du comité de salut public. Tout défaillant, il s’étend dans son fauteuil : à peine il pouvait prononcer ces mots : je suis saoul des hommes : si j’avais un pistolet. . . . . . . Je ne reconnais plus que Dieu et la nature. Après quelques minutes de silence, je lui fais cette question : quelle a pu être sa raison de t’attaquer ? La crainte et la douleur ont besoin de s’épancher. Ce Robespierre est insatiable, dit Barère : parce qu’on ne fait pas tout ce qu’il voudrait, il faut qu’il rompe la glace avec nous. S’il nous parlait de Thuriot, GuffroiArmand Jospeh Guffroy, né le 10 novembre 1742 et mort le 9 février 1801, était un homme de loi. Il fut exclu du club des Jacobins et attaqua violemment Robespierre., RovereJoseph Stanislas François Xavier Alexis Rovère de Fontvielle, né le 16 juillet 1748 et mort le 11 septembre 1798, fut le premier député du Vaucluse à la Convention. C’était un opposant de Robespierre., LecointreLaurent Lecointre, né le 1er février 1742 et mort le 4 août 1805), faisait partie de la Convention., PanisEtienne Jean Panis, né le 7 février 1757 et mort le 22 août 1832, était un révolutionnaire. Il fut exclu du Comité de sûreté général. C'était un protégé de Barère., CambonPierre-Joseph Cambon, né le 10 juin 1756 et mort le 15 février 1820, était un négociant en toiles. Il siégea à la Convention en tant que député de L'Hérault. Il joua un rôle important dans la chute de Robespierre., de ce Monestier, qui a vexé toute ma famille,et de toute la sequelle dantoniste, nous nous entendrions ; qu’il demande encore Tallien, Bourdon de l’OiseFrançois-Louis Bourdon, né le 11 juillet 1758 et mort le 22 juin 1798, était un député à la Convention. Il contribua à la chute de Robespierre., Legendre, Fréron, à la bonne heure… mais DuvalJean-Jacques Duval d'Eprémesnil, né le 5 décembre 1745 et mort le 22 avril 1794, était un magistrat et pamphlétaire., mais AudouinFrançois Xavier Audouin, né le 18 avril 1765 et mort le 23 juillet 1837, était un homme d'église. Il abandonna la prêtrise et intègra le club des Jacobins., mais Léonard BourdonLouis Jean Joseph Léonard Bourbon de la Crosnière, né le 6 novembre 1754 et mort le 29 mai 1807, était un éducateur et révolutionnaire. Il participa à la prise de la Bastille, puis siégea à la commune de Paris, Vadier, Vouland, il est impossible d’y consentir. – Ce sont donc là, répliquai-je, les scélérats, les hommes corrompus de la Convention ? Nous nous séparâmes, lui dans un accablement affreux, moi consterné de ce que je venais d’entendre.

Rentré dans ma chambre, j’écris les noms des victimes désignées au milieu du trouble. Quelle nuit horrible ! quelles tristes réflexions ! Alors, plus de doute du projet médité, arrêté entre les membres du gouvernement, de décimer la convention nationale. Il est évident qu’on était divisé sur les victimes, et que la discorde s’établissait au milieu de ceux qui étaient d’accord de la proscription. Le discours de Robespierre me parut avoir pour objet d’amener Barère à ses fins par la terreur, ou de le perdre s’il s’obstinait dans sa résistance.

Quelle était le motif puissant de ce nouveau 31 mai Le 31 mai 1793 fut une journée d'insurrection, où le peuple de Paris s'est soulevé contre les Girondins. ? où voulait-on en venir ? de quel genre de corruptions les représentants du peuple s’étaient-ils rendus coupables ? avaient-ils descendu des places élevées qu’ils occupaient à la montagne ? Il me parut clair qu’on les regardait comme des obstacles au système agraire, à la continuité du terrorisme qui en était l’instrument ; mais les cris et les plaintes de tant de familles désolées, le désespoir des veuves et des orphelins, ne formaient-ils pas un concert lugubre et déchirant ! Ces charretées de patients qu’on conduisait à la mort, et qui montraient la sérénité de l’innocence, n’effrayaient-elles pas le peuple ? les bras des bourreaux ne commençaient-ils pas à se lasser, et le fer de la destruction à s’émousser ?

Cette idée agrairienne n’était-elle pas elle-même une chimère de novateurs aveugles, épris des idées de perfection et de régularité impossibles dans ce monde, pleins de la vanité des choses humaines, ou la charlatanerie de jongleurs qui tendaient enfin à devenir les tyrans de leurs compatriotes, et les oppresseurs de leur pays !

De quel droit ce très-petit nombre de représentants dominateurs prétendaient-ils disposer de la vie d’un plus grand nombre, insulter à la fois à la puissance conventionnelle et à la souveraineté du peuple ?

Je m’abstiens d’approfondir ces idées politiques.

L’esprit de faction, les délires ambitieux, la fureur des vengeances, paraissaient donc avoir remplacé la passion sublime et pure de faire le bonheur d’un grand peuple. Le feu sacré, dont mon cœur brûlait pour la révolution, s’empara de tout mon être ; et dans ma juste indignation, je jurai de sauver la chose publique, au péril de ma vie, en divulguant ce que je savais. . . . Je combinai toutefois des mesures de prudence.


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